mercredi 14 mars 2018

Cancer gentil cancer













Cancer, gentil cancer




Ave Cancer morituri te salutant
 « Salut Cancer, ceux qui vont mourir (ou pas) te saluent ».

Cancer tue !
Qu'enserres-tu ?
Quand cerf tue
Quand sers-tu ?
Quand serf tue
Quand serres tuent.
Quand serres-tu ?
Khan, serres-tu ? (Khan : souverain mongol)
Khan sers-tu ?
Camp, sers-tu ?
Kant, serres-tu ?  (Kant : philosophe allemand)
Kant, sers-tu ?
Kant, erres-tu ?
Qu'en sais-tu ?
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Tout d’abord régalons-nous de quelques citations se rapportant au problème abordé, le sujet est trop grave pour ne pas s’en moquer : 
- La recherche a besoin d'argent dans deux domaines prioritaires : le cancer et les missiles antimissiles. Pour les missiles antimissiles, il y a les impôts. Pour le cancer, on fait la quête.


- Le cancer ça coûte cher et on n’est même pas sûr de mourir guéri.

- Quand il lut quelque part que fumer provoquait le cancer il cessa de lire.

- Horoscope
    Balance : perdez du poids
    Poissons : vous nagez entre deux eaux
    Cancer : faites un dépistage

Dans les années 80 Desproges ironisait :
- Moi le Cancer je ne suis pas pour ! Il avait raison d’être contre, il en est mort.
 Aujourd’hui cette maladie est si commune qu’elle en est presque banale, sans être devenue bénigne pour autant :
- Ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés (La Fontaine, parlant d’une autre peste).
 Pour parodier Séguéla affirmant :
- Si à 50 ans on n’a pas une Rolex c’est qu’on a raté sa vie (montrant ainsi une curieuse conception de la syntaxe et d’une existence réussie), on pourrait presque dire :
- La personne ne s’étant pas découvert de cancer à 70 ans a mal cherché.

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Jocelyn

Lorsque mon médecin m'appela après une biopsie pour me proposer d'acheter ma maison en viager je commençai à me douter de quelque chose. (Vieille plaisanterie incontournable.)
  Un PSA dosé à 13 me donnait déjà depuis quelque temps une autorité indéniable sur mes voisins, petits joueurs qui ne dépassaient pas 4 ou 5.
" PSA à 13 ça sent mauvais " m'avait dit mon généraliste, pourtant je n'avais aucun symptôme aucune douleur ni gêne, peut-être se trompait-il ?
Huit jours plus tard les résultats tombèrent, moi qui n'avais jamais réussi aucun examen cette fois j'étais comblé, reçu haut la main avec mention bien : cancer de la prostate avec score de Gleason 3 + 4, donc moins agressif que ceux notés 4 + 3 bien que les résultats des additions soient identiques.

L'urologue m'annonça avec un brin de sadisme :
- Nous allons vous castrer chimiquement puis vous aurez droit à deux mois de radiothérapie, vous paraîtrez sans doute vingt ans de plus que votre âge d'ici peu et serez impuissant quelque temps mais rassurez-vous c'est normal !
Vingt ans de plus que mon âge c'est normal ? En bon négociateur à la retraite j'ai proposé un marché :
- On coupe la poire en deux ? Dix ans de plus que mon âge me parait suffisant, et s'il ne me restait que trois mois à vivre pourrais-je avoir juin, juillet et août ?
 Vous n'allez pas me croire mais l'annonce de cette maladie ne me faisait ni chaud ni froid, j'ai survécu à bien d'autres catastrophes alors ce n'est pas un cancer qui allait me terroriser ou faire disparaître mon sens de l'autodérision !
 J'écris sciemment : un cancer et non pas mon cancer comme le nomme la plupart des gens mordus par la bête.
Utiliser le possessif mon m'exposerait à être atteint du syndrome de Stockholm, phénomène psychologique observé chez des otages ayant vécu durant une période prolongée avec leurs geôliers et qui ont développé une sorte d'empathie, de contagion émotionnelle vis-à-vis de ceux-ci selon des mécanismes complexes d'identification et de survie (d’après Wikipédia).
Il est important de bien identifier et qualifier ses ennemis. Je n'ai rien de commun avec ce parasite, il ne m'appartient pas il n'est pas mon mais un. On dit : un étranger et non mon étranger et comme je n'ai pas de sympathie particulière pour les immigrants illégaux souhaitant abuser de mon hospitalité j'utilise le pronom indéfini un, j'éviterai ainsi de m'attacher à lui et si je le traite avec brutalité et mépris peut-être partira -t-il vers d'autres corps plus accueillants.


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 Josie la Tumeur.
 Je vivais au chaud, entourée de milliers d'amies. Elles faisaient leur boulot quelque temps et disparaissaient rapidement, moi je poursuivais mon bonhomme de chemin en voyant bien que je n'étais pas comme les autres, j'étais immortelle et heureuse de l'être.
Seule de mon espèce je m'ennuyais un peu alors j'ai décidé de me diviser.  Contrairement à la majorité des organismes vivants qui utilisent une solution complexe appelée reproduction sexuée, nous, humbles cellules, utilisons la scissiparité pour nous reproduire, fonctionnement simple et efficace.
Les hormones de notre sympathique hôte me nourrirent un peu au début mais au bout de quelques jours de division intense nous étions déjà un groupe important, soudé et très affamé.
Nous avons créé alors notre propre réseau d'alimentation que les humains appellent angiogenèse.
Je n'avais pas d'animosité particulière à l'encontre de celui chez qui nous étions installées, après tout il nous faisait vivre. Je m'évertuais à expliquer aux jeunes que sa mort serait la nôtre, pour vivre heureuses il valait mieux vivre cachées disais-je, mais les cellules adolescentes se croient toujours plus intelligentes que les anciennes, elles sont malignes mais peu futées. Nous avons pu retenir un temps les plus agitées d'entre nous, les métastases, mais elles voulaient absolument voir d'autres paysages, à force d'agitation il arriva ce qui devait arriver, on découvrit notre existence, ce fut le début de nos ennuis.

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 Jocelyn.
 Je dois le reconnaître, ma surprise fut totale. Pendant des années j'ai suivi à la lettre toutes les instructions du corps médical, mangeant des quintaux de tomates et très peu de viande rouge, buvant des hectolitres de jus de grenade, me tenant à l'écart du tabac, de l'alcool et de toute drogue, saupoudrant ma nourriture avec du Curcuma, marchant une heure et demie chaque jour et surtout veillant à respecter les 21 éjaculations mensuelles consécutives à autant de pénétrations (les émissions séminales dues à la masturbation ne comptent pas), respectant ainsi scrupuleusement les préconisations des pervers en blouse blanche.
 Vingt et une éjaculations mensuelles, c'était déjà trop peu et frustrant pour moi, vaillant descendant d'homo-erectus le bien-nommé. Maintenant que voulez-vous, s'il faut absolument réduire quelque temps ma libido pour mon traitement je me délesterai de quelques maîtresses, tant pis, soyons raisonnable la santé avant tout ! De toutes façons la castration chimique m’a bien calmé. Les bouddhistes ont raison : toute souffrance existentielle procède du désir, je n’ai donc plus aucune souffrance autre que physique.

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 Josie la Tumeur.
 Je suis inquiète, malgré tous mes efforts pour rester cachée la prostate a secrété l'antigène spécifique appelé PSA, révélateur de ma présence.
Suite à cela Jocelyn mon bienfaiteur a passé une IRM, je crois que la machine m'a vue distinctement, huit jours plus tard une aiguille a arraché des petits bouts de tissu mou tout autour de moi, je me suis fait toute petite mais après quelques tâtonnements elle a piqué juste là où il ne fallait pas.
 Heureusement la scintigraphie qui suivit ne révéla pas de migration de métastases, on avait réussi à les raisonner, peut-être va-t-on nous laisser tranquilles mais je crains la suite…
 Quelques semaines plus tard une injection de Decapeptyl m'a anesthésiée, on ne peut pas dire que ce fut douloureux mais la testostérone qui contribuait à ma croissance a totalement disparue, l'angiogenèse se bloque alors je me suis mise en hibernation en attendant des jours meilleurs.

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 Jocelyn.
 C'est très amusant, lorsque que j'annonce :
-  J'ai un cancer de la prostate
Mon interlocuteur, quel qu'il soit, prononce toujours les deux mêmes phrases :
- Oh, merde !
Puis
- Mais c'est un cancer qui se soigne bien.
Tu parles s'il se soigne bien, absence de testostérone et irradiation commencent sérieusement à me fatiguer, j'ai vieilli je ne me reconnais pas, le plus déstabilisant reste cette impression de vivre dans le corps d'un autre mais la situation est réversible. Mon charme irrésistible reviendra, m’a-t-on dit, comme au temps de mon ignorance du problème.
En ce temps-là je m'entendais carrément bien avec la bête, aucun signe, aucune douleur, finalement le remède est pire que le mal, c'est en cela qu'on le reconnait.
Pour me consoler je me dis que cela aurait pu être plus ravageur, un AVC ou un infarctus laisse parfois certaines séquelles difficiles à digérer.

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 Josie la tumeur
 Je crois que je ne passerai pas l'hiver. Les rayons sont terriblement destructeurs, j'ai commencé à maigrir, je ne me sens pas très bien, j'ai peur de la mort. J'espère qu'il y a un paradis pour les gentils cancers ayant très peu péché.

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Ce cancer a toujours maudit sa destinée
Et quand vient le moment de mourir il faut voir
Cette tumeur en pleurs " c'est là que je suis née
Je meurs sur ta prostate et j'ai fait mon devoir ".


Elle a fait son devoir c'est-à-dire que oncques
Elle n'eut de souhait impossible, elle n'eut
Aucun rêve de lune aucun désir de jonque
Voguant sur des artères dans un corps inconnu

Toutes sont ainsi fait, vivre la même vie
Pour cellules malignes cela n'est point hideux
Ce cancer n'a qu'un but : vivre en mangeant ma vie
Nous verrons à la fin qui gagnera des deux.


Pauvre cancer avant d'atteindre ta chimère
Ta membrane rompue, du sang plein ton noyau
Toi qui n'a jamais eu de ta vie père ou mère
Tu mourras comme un chien ou bien comme un idiot


 Craignez donc les humains tumeurs terrifiantes
Jamais vous ne pourrez vivre plus longtemps qu'eux
Ils savent désormais vous transformer en fiente
Les bourgeois sont contents d’éliminer les gueux !

 Texte inspiré de Jean Richepin

Mort, où serait ta victoire ?



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Cette histoire est extraite du livre vendu sur Amazon, Fnac, Cultura etc...


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