Cancer, gentil cancer
Ave
Cancer morituri te salutant
« Salut Cancer, ceux qui vont mourir (ou pas) te saluent
».
Cancer tue !
Qu'enserres-tu
?
Quand cerf tue
Quand sers-tu ?
Quand serf tue
Quand serres
tuent.
Quand serres-tu ?
Khan, serres-tu ?
(Khan : souverain mongol)
Khan sers-tu ?
Camp,
sers-tu ?
Kant, serres-tu
? (Kant : philosophe allemand)
Kant, sers-tu ?
Kant,
erres-tu ?
Qu'en sais-tu ?
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Tout
d’abord régalons-nous de quelques citations se rapportant au problème abordé,
le sujet est trop grave pour ne pas s’en moquer :
- La recherche a besoin d'argent dans
deux domaines prioritaires : le cancer et les missiles
antimissiles. Pour les missiles antimissiles, il y a les impôts. Pour
le cancer, on fait la quête.
- Le cancer ça coûte cher et on n’est
même pas sûr de mourir guéri.
- Quand il lut quelque part que fumer
provoquait le cancer il cessa de lire.
- Horoscope
Balance : perdez du poids
Poissons : vous nagez entre deux eaux
Cancer : faites un dépistage
Dans les années 80
Desproges ironisait :
- Moi le Cancer je ne suis pas pour ! Il avait raison d’être contre, il en est mort.
Aujourd’hui cette maladie est si commune
qu’elle en est presque banale, sans être devenue bénigne pour autant :
-
Ils ne mouraient pas tous mais tous
étaient frappés (La Fontaine, parlant d’une autre peste).
Pour
parodier Séguéla affirmant :
- Si à 50 ans on n’a pas une Rolex
c’est qu’on a raté sa vie (montrant ainsi
une curieuse conception de la syntaxe et d’une existence réussie), on pourrait
presque dire :
-
La personne ne s’étant pas découvert de cancer à 70 ans a mal cherché.
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Jocelyn
Lorsque mon
médecin m'appela après une biopsie pour me proposer d'acheter ma maison en
viager je commençai à me douter de quelque chose. (Vieille plaisanterie
incontournable.)
Un
PSA dosé à 13 me donnait déjà depuis quelque temps une autorité indéniable sur
mes voisins, petits joueurs qui ne dépassaient pas 4 ou 5.
"
PSA à 13 ça sent mauvais " m'avait dit mon généraliste, pourtant je
n'avais aucun symptôme aucune douleur ni gêne, peut-être se trompait-il ?
Huit
jours plus tard les résultats tombèrent, moi qui n'avais jamais réussi aucun
examen cette fois j'étais comblé, reçu haut la main avec mention bien : cancer
de la prostate avec score de Gleason 3 + 4, donc moins agressif que ceux notés
4 + 3 bien que les résultats des additions soient identiques.
L'urologue m'annonça
avec un brin de sadisme :
-
Nous allons vous castrer chimiquement puis vous aurez droit à deux mois de
radiothérapie, vous paraîtrez sans doute vingt ans de plus que votre âge
d'ici peu et serez impuissant quelque temps mais rassurez-vous c'est normal !
Vingt
ans de plus que mon âge c'est normal ? En bon négociateur à la
retraite j'ai proposé un marché :
-
On coupe la poire en deux ? Dix ans de plus que mon âge me parait
suffisant, et s'il ne me restait que trois mois à vivre pourrais-je avoir juin,
juillet et août ?
Vous
n'allez pas me croire mais l'annonce de cette maladie ne me faisait
ni chaud ni froid, j'ai survécu à bien d'autres catastrophes alors ce n'est pas
un cancer qui allait me terroriser ou faire disparaître mon sens de
l'autodérision !
J'écris
sciemment : un cancer et non pas mon cancer comme le nomme la plupart des
gens mordus par la bête.
Utiliser
le possessif mon m'exposerait à être
atteint du syndrome de Stockholm, phénomène psychologique observé chez des
otages ayant vécu durant une période prolongée avec leurs geôliers et qui ont
développé une sorte d'empathie, de contagion émotionnelle vis-à-vis de ceux-ci
selon des mécanismes complexes d'identification et de survie (d’après
Wikipédia).
Il
est important de bien identifier et qualifier ses ennemis. Je n'ai rien de
commun avec ce parasite, il ne m'appartient pas il n'est pas mon mais un. On dit : un étranger et non mon étranger et comme je n'ai pas de sympathie particulière pour
les immigrants illégaux souhaitant abuser de mon hospitalité j'utilise le
pronom indéfini un, j'éviterai ainsi
de m'attacher à lui et si je le traite avec brutalité et mépris peut-être
partira -t-il vers d'autres corps plus accueillants.
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Josie la Tumeur.
Je
vivais au chaud, entourée de milliers d'amies. Elles faisaient leur boulot
quelque temps et disparaissaient rapidement, moi je poursuivais mon bonhomme de
chemin en voyant bien que je n'étais pas comme les autres, j'étais immortelle
et heureuse de l'être.
Seule
de mon espèce je m'ennuyais un peu alors j'ai décidé de me diviser.
Contrairement à la majorité des organismes vivants qui utilisent une solution
complexe appelée reproduction sexuée, nous, humbles cellules, utilisons la
scissiparité pour nous reproduire, fonctionnement simple et efficace.
Les
hormones de notre sympathique hôte me nourrirent un peu au début mais au
bout de quelques jours de division intense nous étions déjà un groupe
important, soudé et très affamé.
Nous
avons créé alors notre propre réseau d'alimentation que les humains appellent
angiogenèse.
Je
n'avais pas d'animosité particulière à l'encontre de celui chez qui nous étions
installées, après tout il nous faisait vivre. Je m'évertuais à expliquer
aux jeunes que sa mort serait la nôtre, pour vivre heureuses il valait mieux
vivre cachées disais-je, mais les cellules adolescentes se croient
toujours plus intelligentes que les anciennes, elles sont malignes mais peu
futées. Nous avons pu retenir un temps les plus agitées d'entre nous, les
métastases, mais elles voulaient absolument voir d'autres paysages, à force
d'agitation il arriva ce qui devait arriver, on découvrit notre existence, ce
fut le début de nos ennuis.
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Jocelyn.
Je
dois le reconnaître, ma surprise fut totale. Pendant des années j'ai
suivi à la lettre toutes les instructions du corps médical, mangeant des
quintaux de tomates et très peu de viande rouge, buvant des hectolitres de jus
de grenade, me tenant à l'écart du tabac, de l'alcool et de toute drogue,
saupoudrant ma nourriture avec du Curcuma, marchant une heure et demie chaque jour
et surtout veillant à respecter les 21 éjaculations mensuelles consécutives à
autant de pénétrations (les émissions séminales dues à la masturbation ne
comptent pas), respectant ainsi scrupuleusement les préconisations des pervers
en blouse blanche.
Vingt
et une éjaculations mensuelles, c'était déjà trop peu et frustrant pour
moi, vaillant descendant d'homo-erectus
le bien-nommé. Maintenant que voulez-vous, s'il faut absolument réduire quelque
temps ma libido pour mon traitement je me délesterai de quelques
maîtresses, tant pis, soyons raisonnable la santé avant tout ! De toutes façons
la castration chimique m’a bien calmé. Les bouddhistes ont raison : toute
souffrance existentielle procède du désir, je n’ai donc plus aucune souffrance
autre que physique.
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Josie la Tumeur.
Je
suis inquiète, malgré tous mes efforts pour rester cachée la prostate a secrété
l'antigène spécifique appelé PSA, révélateur de ma présence.
Suite
à cela Jocelyn mon bienfaiteur a passé une IRM, je crois que la machine m'a vue
distinctement, huit jours plus tard une aiguille a arraché des petits
bouts de tissu mou tout autour de moi, je me suis fait toute petite mais après
quelques tâtonnements elle a piqué juste là où il ne fallait pas.
Heureusement
la scintigraphie qui suivit ne révéla pas de migration de métastases, on avait
réussi à les raisonner, peut-être va-t-on nous laisser tranquilles mais je
crains la suite…
Quelques
semaines plus tard une injection de Decapeptyl m'a anesthésiée, on ne peut pas
dire que ce fut douloureux mais la testostérone qui contribuait à ma croissance
a totalement disparue, l'angiogenèse se bloque alors je me suis mise en
hibernation en attendant des jours meilleurs.
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Jocelyn.
C'est très
amusant, lorsque que j'annonce :
-
J'ai un cancer de la prostate
Mon
interlocuteur, quel qu'il soit, prononce toujours les deux mêmes phrases :
-
Oh, merde !
Puis
-
Mais c'est un cancer qui se soigne bien.
Tu
parles s'il se soigne bien, absence de testostérone et irradiation commencent
sérieusement à me fatiguer, j'ai vieilli je ne me reconnais pas, le plus
déstabilisant reste cette impression de vivre dans le corps d'un autre mais la
situation est réversible. Mon charme irrésistible reviendra, m’a-t-on dit,
comme au temps de mon ignorance du problème.
En
ce temps-là je m'entendais carrément bien avec la bête, aucun signe,
aucune douleur, finalement le remède est pire que le mal, c'est en cela qu'on
le reconnait.
Pour
me consoler je me dis que cela aurait pu être plus ravageur, un AVC ou un
infarctus laisse parfois certaines séquelles difficiles à digérer.
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Josie la tumeur
Je
crois que je ne passerai pas l'hiver. Les rayons sont terriblement
destructeurs, j'ai commencé à maigrir, je ne me sens pas très bien, j'ai peur
de la mort. J'espère qu'il y a un paradis pour les gentils cancers ayant très
peu péché.
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Ce cancer a toujours maudit sa destinée
Et quand vient le moment de mourir il faut voir
Cette tumeur en pleurs " c'est là que je
suis née
Je meurs sur ta prostate et j'ai fait mon devoir
".
Elle a fait son devoir c'est-à-dire que oncques
Elle n'eut de souhait impossible, elle n'eut
Aucun rêve de lune aucun désir de jonque
Voguant sur des artères dans un corps inconnu
Toutes sont ainsi fait, vivre la même vie
Pour cellules malignes cela n'est point hideux
Ce cancer n'a qu'un but : vivre en mangeant ma vie
Nous verrons à la fin qui gagnera des deux.
Pauvre cancer avant d'atteindre ta chimère
Ta membrane rompue, du sang plein ton noyau
Toi qui n'a jamais eu de ta vie père ou mère
Tu mourras comme un chien ou bien comme un idiot
Craignez donc les humains tumeurs terrifiantes
Jamais vous ne pourrez vivre plus longtemps qu'eux
Ils savent désormais vous transformer en
fiente
Les bourgeois sont contents d’éliminer les gueux !
Texte
inspiré de Jean Richepin
Mort, où serait ta victoire ?
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